mercredi 20 septembre 2023

Ma mère Saçia.

Ma mère Saçia portes un nom que l'on portes de moins a moins :un nom qui n'est plus à la "mode" de nos jours, d'ailleurs tous les noms de cette époque, qui sont des noms de nos racines  Amazighs sont pour certains, une honte: un reniement incompréhensible . Elle est née en 1935 quelques parts dans la riche plaine de Besbes (ex Randon ) dans un lieu dit :"Bordj Tahar" devenu aujourd'hui "Belahmar" de l'union improbable d'une mère au foyer kabyle de Tigzirt en Grande Kabylie venue rejoindre ses frères célibataires comme "bonne" a tout faire et d'un père ouvrier agricole venu de Ferjioua -non loin de Djemila: une ancienne ville Romaine,  en petite Kabyle- à quatorze ans chercher du travail  dans la plaine d'Annaba suite à la disparition de son père et le remariage forcé de sa mère . A trois ans et demi en 1939, elle perdit sa mère après une couche difficile. 
Suite à  la disparition de sa mère, tous ses ses sœurs et ses frères furent dispersés, notamment les filles. Elles furent placées ça et là chez des parents divers dont elle garde un souvenir lointain, pour terminer son errance chez sa sœur aînée qui venait de se marier à 16 ans . Elle avait alors 8 ans. Son père, travailleur agricole chez les Laoubdia: des propriétaires terriens, vivra seul dans un gourbi et s'occupera de ses deux fils: l'aîné Labidi -malade mental- et de son autre fils Belgacem. Hadda sa sœur cadette après un bref passage  chez une cousine,  rejoindras ma mère chez sa sœur aînée pour ensuite se marier aussitôt en 1949 avec un cadre de la Tabacoop de vingt ans son aîné : un certain Birem Mahmoud ; un homme pieux  et rustre  au contact difficile et pratiquant un Islam rigoriste et sectaire qui permettais à ses disciples d'accéder au paradis même s'ils sont devenus déviants. Seule sa dernière sœur  restera chez des cousins proches, jusqu'à son mariage à la fin des années cinquantes. En Avril 1954, a 18 ans et demi elle se mariera avec mon .père qui avait le même âge. C'est la grand-mère de mon père,  une certaine Nouna qui  était connue au village pour être une femme à poigne, qui est venue voir ma mère chez sa sœur.  Elle lui a plu et demandera sa main pour son petit-fils ( mon père).Elle l'a trouvé belle et  d'une blancheur que l'ont recherché a l'époque  c'était le mélange d'une Kabyle d'Iflissen et d'un kabyle de la région de Ferjioua. Mon père vivait alors  dans une grande famille parmi ses frères,  sœurs, ses parents et sa grand-mère dans la bâtisse ( cour)  qu'avait acquis cette dernière après avoir exercé comme chef de plantation ( kabrana) dans divers champs autour du village. 
Dés le déclenchement de la guerre d'Algérie mon père fut contraint de quitter le village a 20 ans juste après ma naissance pour échapper à une mort certaine:  activiste et militant du MTLD, il était dans le viseur comme d'autres jeunes  nationalistes des autorités coloniales. Quelques mois après son départ en France, tous les membres du groupe avec qui il militait furent neutralisait et tués suite à une rafle. A son arrivée en France, mon père errera dans plusieurs villes: il vivra dans la misère des blockhaus  et les taudis a Lyon  puis a Nancy et finira a s'etablir durablement à Marseille. Ma mère le rejoindra en 1959. Après quatre ans de séparation. Au cour de son absence, elle fut contraint de revenir chez sa sœur. Car mon grand-père qui travaillait comme cheminot et subvenait au besoin  de la famille un certain H'sen fut arrêté suite à une rafle mémorable ou des dizaines  de prétendus fellags furent arrêtés . Il disparaîtra à jamais- on saura plus tard qu'il fut emmené dans une ferme dite "syndicat" à quelques kilomètres du village et livré à une horde de harkis excités. Frêle et affamé,  il rendit l'âme après une série de sévices notamment celle d'utiliser les chiens pour lui faire peur.. il a été certainement  jeté dans une fosse commune...on le retrouvera jamais 
A Marseille, mon père travaillais comme peintre-plâtrier et militait au sein du FLN.